Nous l’avons vu, la mission légale de certification des comptes du commissaire aux comptes comporte plusieurs phases qui s’intègrent dans la démarche d’audit :
- prise de connaissance de l’environnement et évaluation des risques inhérents à l’entité,
- qualification des contrôles internes et tests d’efficacité de ces contrôles,
- analyse des comptes identifiés comme susceptibles de comporter des anomalies.
Ces différentes étapes effectuées par le CAC lui permettent d’établir un rapport sur les comptes annuels. Il certifie que ceux-ci sont réguliers, sincères et fidèles au résultat et au patrimoine de la société.
Cette certification correspond aux deux premières parties du rapport sur les comptes annuels : la première — appelée « certification des comptes » — donne l’opinion sur les comptes (certification sans réserve, avec réserve(s) ou refus de certification), alors que la deuxième partie du rapport — dénommée « justifications des appréciations » — donne la justification de cette opinion.
D’ailleurs, cette deuxième partie est une invention franco-française. Elle part d’un bon sentiment : l’idée que le CAC va expliquer ses motivations quant aux appréciations qu’il a faites donne une certaine transparence à son travail, mais elle se révèle inefficace puisque la grande majorité des rapports se contente de recopier la formulation très juridique des modèles donnés par la Compagnie Nationale des Commissaires aux Comptes. Des petites variantes font alors état du fait que le contrôle a essentiellement porté sur les valorisations des filiales dans une holding ou qu’une grande attention a été portée aux créances clients puisque celles-ci représentent 3 fois le chiffre d’affaires — ce qui n’est pas a priori normal — enfin bref, la belle affaire. La troisième partie, « vérifications et informations spécifiques », ne dit pas grand-chose dans son formalisme non plus, et pourtant elle représente un pan entier de la vérification : ce sont les vérifications dites « spécifiques » prévues expressément par la loi.
Ces vérifications spécifiques portent pour l’essentiel sur le respect des règles légales et statutaires, les informations données aux actionnaires et aux tiers, l’égalité entre les actionnaires, les conventions conclues et les diverses attestations à fournir. Elles sont strictement imposées et défi nies par la Loi et ont chacune une finalité propre que l’on retrouve le plus souvent dans la loi qui les institue. Elles ont en commun la préoccupation du législateur de promouvoir un certain nombre de règles de fonctionnement qui lui paraissent essentielles. Le commissaire aux comptes se trouve ainsi chargé de vérifier le respect de certaines règles et d’informer les actionnaires de leur violation éventuelle, ou d’un rôle actif dans certaines procédures, par exemple en matière de conventions réglementées, pour lesquelles je vous renvoie à la série d’articles parus sur Comptazine.
Ces travaux sont relatifs à la vérification de la sincérité et de la concordance avec les comptes. Il s’agit des informations données dans le rapport de gestion et des documents adressés aux actionnaires ou associés sur la situation financière et les comptes. La concordance des comptes n’est que le bon vieux pointage des chiffres inscrits dans ces documents. C’est l’assurance que ces chiffres sont les bons et la preuve que le dirigeant n’est pas allé s’amuser à remplir son rapport de chiffres farfelus.
Mais il doit aussi vérifier l’égalité entre les associés, les actionnaires ou les administrateurs du conseil d’administration par exemple (article L.823–11 du Code de Commerce), ou encore entre les membres d’une association. Le CAC est le garant de la relation entre les actionnaires ou administrateurs : la plupart du temps cela revient à vérifier que Mr Smith a bien touché ses 12,22 % de dividendes, mais parfois c’est aussi de vérifier que tous les associés ont bien été convoqués à l’Assemblée Générale ou que le nombre de leurs droits de vote est respecté, ou encore que les quorums ont été respectés pour les assemblées. Nous nous trouvons donc bien au cœur des relations dans la société et pas seulement à un niveau comptable.
On peut noter également le signalement des irrégularités juridiques et incertitudes relevées au cours de l’accomplissement de sa mission qui peuvent faire l’objet d’un rapport particulier à l’Assemblée Générale : par exemple le compte courant de la présidente est devenu fortement débiteur ; ce n›est pas normal et il faut que les associés ou actionnaires le sachent !
Autre vérification et diffusion d’informations, informations sensibles s’il en est, le commissaire aux comptes atteste également, lorsque cela est prévu par les textes, du montant global des rémunérations versées aux 5 ou 10 personnes les mieux rémunérées.
Ces travaux ne sont pas assez mis en valeur par le mode de communication prévu par les textes et notamment les rapports. Il faut quand même rappeler que le commissaire aux comptes n’est pas dispensateur d’informations auprès des tiers et qu’il doit se cantonner à un cadre de communication contraint et réglementairement défini. Pourtant, ces vérifications sont également essentielles à l’actionnaire minoritaire ou au membre de l’association, pour lequel, elles représentent un gage de sécurité quant à l’information qui lui est donnée ainsi qu’au respect de ses droits, quelle que soit la taille de l’entité. En validant le respect de l’application des règles et des lois, le commissaire aux comptes apporte l’assurance, tant aux tiers qu’aux dirigeants des entités, d’un certain niveau de sécurité.