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80 % d’économies de dépenses et 20 % de hausses d’impôts

Le but a donc été de présenter les 18 milliards d’euros d’économies de ce budget avec 80 % de baisse des dépenses et 20 % de hausse d’impôts soit, en gros, 15 milliards d’euros pour les baisses et 3 milliards d’euros pour les dépenses. Comment se répartissent ces 15 milliards d’euros, enfin 14,8 pour être précis ? Force est de constater que le gouvernement a choisi la méthode tout terrain :

  • sur les dépenses de maladie et la « sphère sociale » : 5,8 milliards d’euros;
  • sur les dépenses de l’état, des agences et entreprises publiques etc. : 5,2 milliards d’euros;
  • sur les dépenses des collectivités territoriales: 3,3 milliards d’euros;
  • sur la charge de la dette : 0,5 milliards d’euros.

Types d’économies

Montant économies
(EN MILLIARDS d’€)

SPHERE SOCIALE

5,8

Maîtrise des dépenses d’assurance maladie

2,9

Réformes des retraites

1,9

Economies sur les frais de gestion des caisses de sécurité sociale

0,5

Economies attendues de la renégociation de la convention d’assurance chômage

0,3

Economies sur les prestations familiales

0,2

PLF 2014

9,0

Dépenses de fonctionnement

2,6

Masse salariale

1,7

Fonctionnement courant

0,9

Concours des autres entités

3,3

Autres dépenses (hors dette et pensions)

2,6

Charge de la dette

0,5

TOTAL

14,8

 

Commençons par les dépenses de maladie de la « sphère sociale » qui représentent 47 % des dépenses publiques : comme nous l’avons vu plus haut, en fait d’économies, ce sont des non-dépenses. C’est-à-dire que le taux de progression des dépenses a été de 4,2 % en moyenne entre 2002 et 2011. En 2013, une hausse de 2,7 % est attendue. La loi de finances prévoit donc une hausse de seulement 2,4 %. Pour réaliser l’objectif, on doit économiser 2,4 milliards ! Les moyens pour y parvenir : baisses des prix des médicaments (déremboursements de médicaments jugés de confort et baisse du pourcentage de remboursement sur d’autres), baisses de tarifs dans certaines spécialités, maîtrise médicalisée et gains de productivité dans le secteur hospitalier (c’est-à-dire moins d’hôpitaux, gel des salaires de la fonction hospitalière, regroupement de structures pour des gains d’économies d’échelle).

Evolution-depenses-d'assmaladie

L’autre point principal des économies de dépenses sociales, est la pseudo-réforme des retraites qui a eu lieu au printemps mais qui ne résout ni les problèmes de fond, ni ceux sur le long terme. Néanmoins, les partenaires sociaux se sont mis d’accord pour une indexation des retraites complémentaires limitée à 0,8 % en 2013 et une indexation inférieure de 1 point à l’inflation pour les années 2014 et 2015, ce qui fait gagner environ 1 milliard d’euros. Et par une astuce comptable, qui ne fonctionne qu’une seule année, le décalage de la revalorisation des retraites en octobre au lieu d’avril (6 mois de gagnés), vous recueillez 900 millions.

Dernier point : la politique familiale en prend un sacré coup. On peut discuter à l’infini sur le bien-fondé de faire plus d’enfants que les autres pays européens et sur l’incitation impulsée par notre politique de la famille. Toujours est-il que le gouvernement cherche l’argent là où il est. Or, il n’y a plus aucune source taboue : l’allocation de base de la prestation d’accueil du jeune enfant (184,62 euros par mois pour un enfant de moins de 3 ans) sera divisée par deux pour les familles dont les ressources dépassent un certain seuil. Quant au montant du complément de libre choix d’activité (quand l’un des deux parents s’arrête de travailler pour élever l’enfant avant ses 3 ans) celui-ci sera uniformisé pour toutes les familles. La majoration qui s’adressait aux familles les plus aisées est supprimée : ceux qui ne touchaient pas les 184,62 euros du fait du plafond de ressources se les voyaient réintégrés s’ils s’arrêtaient de travailler pour élever leur progéniture. Le gouvernement a-t-il bien compris que lorsqu’on s’arrêtait de travailler, on ne touchait plus de salaire ?

Suivent les économies de dépenses de l’État qui représentent globalement 37 % des dépenses publiques : il faut bien comprendre que les dépenses publiques et les montants des retraites augmentent (hors intérêts de la dette) spontanément de 7 milliards d’euros tous les ans du fait de leur simple revalorisation, souvent indexée sur l’inflation. L’idée est de les faire baisser en valeur absolue de 1,5 milliard (baisses réelles) et d’obtenir, par la magie des comptes publics, une économie de 8,5 milliards d’euros (soit 1,5 de baisse + 7 de non augmentation, c’est bon maintenant vous avez compris le truc ?). Comment ? On optimise les dépenses de fonctionnement et on rationalise les fonctions supports. Gel des salaires, gel des avancements, stabilité des effectifs : c’est le point majeur si on ne veut pas que ça augmente trop, notamment 8 000 emplois supprimés au ministère de la défense qui compense les postes créés dans l’éducation (9 984 postes créés précisément).

Ensuite, on fait des économies de fonctionnement : on ne change pas les ordinateurs cette année, on ne répare pas les voitures de police, on réutilise le papier au verso, on ne chauffe pas les locaux dans certains secteurs (le CNRS, l’établissement de recherche est un spécialiste pour ne pas chauffer les locaux) par exemple. Vous souriez, mais c’est ce qui se passe sur le terrain.

Compteur des 65 000 – schémas d’emplois (ETP)

LFR du 16 août 2012

LFI 2013

2014

Créations dans l’éducation nationale*

6 728

8 781

8 804

Créations dans l’enseignement agricole*

50

230

180

Créations dans les universités*

 

1 000

1 000

Total «priorité enseignement»

6 778

10 011

9 984

Police et gendarmerie

 

480

405

Justice

 

520

590

Total «priorité sécurité et justice»

 

1 000

995

Total des créations en faveur des priorités gouvernementales
(65.000 créations sur le quinquennat)

Solde annuel

6 778

11 011

10 979

En cumul

6 778

17 789

28 768

Affaires étrangères

 

-184

-196

Affaires sociales et santé

 

-186

-223

Agriculture, agroalimentaire et forêt hors enseignement agricole

 

-280

-231

Culture et communication

 

-15

-83

Défense

 

-7 234

-7 881

Écologie, développement durable, énergie

 

-614

-522

Économie et finances

 

-2 353

-2 564

Égalité des territoires et logement

 

-662

-697

Intérieur hors police et gendarmerie

 

-614

-694

Outre-mer

 

0

0

Redressement productif

 

-9

-2

Services du Premier ministre hors justice administrative

 

-6

107

Travail, emploi, formation professionnelle et dialogue social

 

-141

-137

Total des suppressions de postes

 

 

 

Solde annuel

 

-12 298

-13 123

En cumul

 

-12 298

-25 421

Solde net annuel

6 778

-1 287

-2 144

Solde net cumulé

 

5 491

3 347

 

Pourquoi ne pas éliminer une strate du millefeuille (communes, intercommunes, cantons, départements, régions, agglomérations) ? Pourquoi ne pas remettre sur la table les 30 milliards d’aides au secteur immobilier (toutes aides confondues pour les ménages et les entreprises du secteur) et mille autres exemples ?

Ensuite: 3,3 milliards sur les « concours et autres entités », qui représentent 21 % des dépenses publiques, à savoir, collectivités territoriales, opérateurs et Union Européenne. Concrètement : 1,5 milliard de dotation en moins de l’État vers les collectivités territoriales ainsi réparti : – 840 M€ pour les communes (56 %), – 476 M€ pour les départements (32 %) et – 184 M€ pour les régions (12 %) pour l’année 2014 et autant pour l’année 2015. Ne rêvons pas, les collectivités se rabattront sur les impôts locaux pour se « récupérer » (les impôts locaux eux aussi ne cessent d’augmenter). En effet, l’État se décharge d’une partie de ses prérogatives sur les collectivités territoriales : collèges et lycées par les conseils généraux et régionaux, le RSA laissé en gestion aux départements etc.

Scandale de la suppression de la prime d’apprentissage et de la réforme du crédit d’impôt apprentissage !

Enfin, on trouve un fourre-tout de 2,6 milliards d’économies, dont « la démarche d’évaluation de la modernisation de l’Etat (MAP) constitue un levier efficace » selon la présentation officielle du projet de loi de finances.

Dans un tableau en page 24, rubrique «Travail et Emploi», on trouve la suppression de la prime d’apprentissage (Indemnité compensatrice forfaitaire ou ICF, versée par la Région, ndlr) et la création d’une nouvelle prime pour les entreprises de moins de 10 salariés où l’effet incitatif est le plus fort : 550 millions d’euros d’économies.

Certes les TPE (Très petites entreprises de moins de 10 salariés) représentent les deux tiers des bénéficiaires de l’aide supprimée mais, alors que les grands groupes commençaient à se mettre à l’apprentissage suite à l’instauration des quotas, la suppression de cette aide ne risque pas de les inciter à embaucher au-delà de la loi. Il faut néanmoins toujours rappeler qu’un quart des jeunes de moins de 25 ans est au chômage en France. On ne connaît d’ailleurs toujours pas le mécanisme de remplacement de cette aide régionale pour les TPE.

On peut noter qu’un amendement au projet initial a été voté en première lecture à l’Assemblée Nationale qui prévoit qu’à compter du 1er janvier 2014, le crédit d’impôt apprentissage ne sera désormais ouvert qu’au titre des apprentis n’ayant pas achevé la 1re année de leur cycle de formation et cette dernière devrait les préparer à un diplôme ou à un titre d’un niveau maximum Bac +2.

Pour 2013, les entreprises continueront à bénéficier du crédit d’impôt d’un montant de 1 600 € par le nombre moyen annuel d’apprentis en première année de leur cycle de formation d’un niveau équivalent ou inférieur à Bac+2. Ce montant serait réduit à 800 € pour les apprentis en 2e et 3e année de leur cycle de formation ou préparant des diplômes d’un niveau supérieur quelle que soit l’année de leur cycle de formation ! Les BTS oui, les DCG ou les licences non !

On reste pantois. Un des thèmes majeurs de la campagne du président élu, portait sur la jeunesse et sur l’espoir qu’il devait lui réinsuffler ! Les contrats de génération, ou emplois d’avenir, c’est bien gentil, mais l’apprentissage paraît autrement plus bénéfique surtout pour la jeunesse. C’est d’autant plus incohérent que le chef de l’État s’était fixé un cap de 500 000 apprentis à la fin du quinquennat…

Par ailleurs, on trouve dans ce fourre-tout la réforme du bonus/malus des véhicules propres (230 millions d’économies) : 163 millions de baisse d’aide au développement, l’arrêt des grands chantiers de la Culture (55 millions), une réforme de l’aide juridictionnelle (le droit à une aide juridique gratuite ou réduite) pour 30 millions d’économies, ou même la renégociation du contrat de concession avec le Stade de France pour 16 millions d’euros d’économies. En gros, on gratte les fonds de tiroirs.

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