Comme chaque année à l’inscription pour les études supérieures, vous allez voir ou revoir les stands des mutuelles étudiantes avec leurs vendeurs qui vous supplient d’adhérer, et vous poursuivent sur tout le parcours d’inscription pour que vous cochiez la « bonne case ». Alors, combien ça coûte et est-ce obligatoire ? A quoi servent-elles ? LMDE ou une de ses concurrentes ? Quelle est la meilleure ?

Qui est concerné ?

En théorie, si vous vous inscrivez dans un établissement d’enseignement supérieur, et si vous avez entre 16 ans et 28 ans, vous êtes concerné.

Mais, bien entendu, la bureaucratie française est ainsi faite que sur les 2,3 millions d’étudiants, environ 500 000 n’ont pas à s’inscrire auprès d’une sécu étudiante. Ces cas d’exclusions vous concernent si :

  • vous avez entre 16 et 19 ans et vos parents relèvent d’un régime spécifique : travailleurs non salariés, militaires, fonctionnaires internationaux, membres de l’Assemblée Nationale, EDF, Opéra, etc.  
  • et là quel que soit votre âge : un de vos parents est agent de la SNCF,
  • vous êtes assuré à titre personnel en qualité de salarié : les salariés sont affiliés au régime dit « général » où la cotisation est prélevée directement sur le salaire : faites bien attention ! Dans ce cas, il faut à tout prix éviter les périodes pour lesquelles vous n’êtes dans aucun régime de sécurité sociale : 60 heures par mois de travail ou 120 heures par trimestre,
  • ou vous êtes marié à un salarié et dépendez de lui ou d’elle.

Vous dépendez donc de la profession de vos parents, ou de votre conjoint, merci pour l’autonomisation et l’égalité entre tous.

Sécurité sociale ou mutuelle : quelle est la différence ?

Pour la plupart d’entre vous, vous devez donc sortir de l’ombre protectrice de vos parents et vous confronter au soleil brûlant de la compréhension du système social et de la paperasse.

Donc, les premiers pas indépendants dans le système se font face à ces organismes de Sécurité Sociale étudiants, et ils sont rudes car la confusion règne.

Ce qu’on appelle « mutuelle étudiante » recouvre deux entités tout à fait distinctes qu’il ne faut absolument pas confondre :

  • La sécurité sociale, qui est obligatoire,
  • La mutuelle, ou complémentaire santé, qui est facultative.

Le centre de sécurité sociale

On va vous demander de choisir entre deux centres, et seulement deux :

  • soit la LMDE, présente partout sur le territoire,
  • soit sa concurrente régionale : SMEREP, SMEBA, VITTAVI, SMECO, MEP, MGEL, SMEREB, SMERRA, SMENO, SMERAG.

Le centre de Sécurité Sociale que vous choisirez – LMDE ou votre mutuelle régionale – ne fait que remplacer la sécurité sociale de vos parents : rien de plus.

La sécurité sociale est un système d’assurance collectif obligatoire : contre une cotisation que vous payez à l’état, vous avez le droit au remboursement d’une partie de vos frais médicaux (consultations médecins, médicaments, hospitalisation par exemple). Le droit à la sécurité sociale est le même pour toute la population, étudiants compris : quel que soit le centre de sécurité sociale que vous allez choisir (LMDE ou concurrent régional), les remboursements seront équivalents. Ce sont les remboursements de la sécurité sociale dont on trouve les détails sur le site ameli.fr, onglet « ce que vous serez remboursé ». Donc pour cette partie obligatoire, vous ne faites que choisir un centre de traitement de vos remboursements !

En réalité, pour cette partie, les « mutuelles étudiantes » ne sont que des intermédiaires qui refacturent entièrement à la Caisse Nationale d’Assurance Maladie les frais qu’elles vous remboursent.

Par exemple, pour une consultation chez le médecin généraliste à 23 euros, la sécurité sociale vous rembourse 70 %, soit 16,10 euros, moins 1 euro pour votre aimable participation : ainsi, 15,1 euros vous seront effectivement versés sur votre compte bancaire. La Sécurité Sociale ne vous remboursera rien de plus. Si votre médecin pratique en plus des dépassements d’honoraires, par exemple si la consultation vous coûte 30 euros : c’est à vous de payer les 30 – 15,1 = 14,90 euros de différence. Sauf si vous avez éventuellement une mutuelle qui prend en charge les différences.

Le Lexique

Affilié : personne qui cotise à une Sécu.

Adhérent : personne qui cotise à une mutuelle.

Cotisation Sécurité sociale : somme payée par l’assuré pour avoir droit aux remboursements de la Sécurité Sociale.

Dépassement d’honoraires : prix d’un acte médical supérieur au tarif conventionné pris en charge par la Sécurité Sociale.

Taux conventionnel : taux de remboursement fixé par la Sécurité Sociale pour chaque acte médical.

Ticket modérateur ou part complémentaire : part non remboursée qui reste à votre charge ou à celle de votre mutuelle.

La mutuelle, et bien d’autres choses encore.

Ce que cherche à vous vendre la LMDE ou les mutuelles étudiantes régionales c’est un ensemble de prestations facultatives, en plus des 211 euros que vous avez payés pour votre sécurité sociale. C’est là que la confusion survient. Ces organismes étudiants ont à la fois une mission de service public (le traitement de vos dossiers de sécurité sociale) et des objectifs commerciaux lucratifs notamment en vendant des complémentaires santé. Vous n’êtes en aucun cas obligé de payer pour quelque prestation supplémentaire que ce soit !

Bien que la population étudiante soit dans son ensemble en bonne santé, il faut bien reconnaître que parfois les remboursements de la Sécurité Sociale sont faibles, ou inadaptés à votre situation : les lunettes, les soins dentaires ou les séjours à l’hôpital sont particulièrement mal remboursés.

Par exemple, pour les lunettes :

  • le remboursement de la monture de la sécurité sociale est de 60 %… sur la base d’un tarif de 2,84 euros ! La Sécu vous rembourse donc effectivement 60 % x 2,84 euros = 1,70 euros pour votre monture ;
  • les verres ne sont pas bien mieux lotis : 60 % x 24,54 = 14,72 euros de remboursement.

Soit un remboursement total maximum de : 14,72 + 2,84 = 17,56 euros pour vos lunettes !

Il est donc parfois utile d’avoir une mutuelle qui peut venir compléter certaines prestations, mais rien ne vous oblige à choisir une mutuelle « étudiante ». Alors vous n’avez que deux options pour votre sécurité sociale, pour des prestations complémentaires vous n’avez qu’à faire votre choix : MMA, Allianz, Direct Assurance, Groupama, MNH… ou n’importe quel autre prestataire, à vous de comparer !

Et combien ça coûte ?

La sécurité sociale obligatoire.

Pour adhérer à la sécurité sociale étudiante obligatoire : ce sont les fameux 211 euros qu’on vous demande de régler à l’inscription, et ce, pour l’année entière.

Auparavant, vous étiez couvert par le biais de vos parents, maintenant vous devez payer votre droit de bénéficier des prestations de la sécurité sociale, mais comme vous n’avez pas encore de revenus (en dehors des étudiants salariés qui ne sont pas concernés par la sécurité sociale étudiante), on vous fait payer un prix forfaitaire pour que vous puissiez bénéficier d’un an de sécurité sociale.

Là encore, le fait que vous choisissiez LMDE ou l’autre, n’aura aucune conséquence : vous paierez toujours 211 euros. D’ailleurs ces 211 euros ne vont pas dans la poche de la mutuelle étudiante, mais bien dans celle de l’état, puisque c’est l’URSSAF qui les perçoit – Union de Recouvrement des cotisations de Sécurité Sociale et d’Allocations Familiales : l’organisme chargé de collecter l’ensemble des charges sociales.

La mutuelle, ou assurance complémentaire santé, facultative.

Entre 5 et 35 euros par mois, tout dépend des prestations que vous souhaitez, et du prix que vous pouvez y mettre. Les formules sont très nombreuses, il faut aller regarder chez les mutuelles et assureurs, car les différences sont très importantes. Sur le segment des mutuelles à tarif très bas (entre 5 et 10 euros), les mutuelles étudiantes sont compétitives car les assureurs et complémentaires traditionnels ont du mal à descendre sous les 12 euros par mois. En revanche, pour les prestations un peu plus complètes (25 euros par mois), les prestations fournies par les assureurs et complémentaires traditionnels (Direct assurance, MMA, GROUPAMA, ALLIANZ, SWISSLIFE, MNH…) sont bien meilleures.

Pour 5 euros par mois, vous allez avoir la prise en charge à 100 % de la consultation chez le médecin et le remboursement des médicaments courants en totalité (c’est à dire que votre mutuelle va prendre en charge la différence entre ce que rembourse la Sécurité Sociale et le prix), mais rien sur l’optique ou le dentaire.

Pour 30 euros par mois, vous pouvez avoir en plus jusqu’à 250 euros de monture et verres, 300 euros de prothèse dentaire, et un remboursement total de tous les médicaments par exemple.  

Nous vous conseillons vivement de consulter les tableaux comparatifs que l’UFC QUE CHOISIR a réalisés en septembre 2012.

Aujourd’hui les « mutuelles étudiantes » vous proposent de nombreux autres produits à but lucratif : assurances, prestations bancaires… : celles-ci peuvent être intéressantes, mais ne sont en aucun cas obligatoires.

Les sites à consulter

  • service-Public.fr : Sécurité sociale étudiante. Un étudiant inscrit dans un établissement de l’enseignement supérieur doit obligatoirement s’affilier au régime étudiant de la Sécurité sociale, sauf exceptions. Les conditions d’affiliation varient selon la situation personnelle de l’étudiant (âge, activité salariée, profession des parents,…).
  • ameli.fr : Combien serez-vous remboursé ? Médicaments, lunettes, hospitalisation ou consultations chez un professionnel de santé ? Ces prestations ont un prix. À quel taux serez-vous remboursé ?

A quoi servent les mutuelles étudiantes et sont-elles efficaces ?

Et bien, la « sécu étudiante » est une spécificité française qui n’a aucun équivalent dans le monde, et qui pourrait bien disparaître. Du Sénat à la Cour des Comptes,  en passant par l’UFC QUE CHOISIR, plusieurs institutions dénoncent l’inutilité de ces organismes de gestion étudiants qui ont des frais de fonctionnement exorbitants et sont des organes financeurs des syndicats étudiants.

Il semblerait que ces mutuelles étudiantes soient devenues bien moins efficaces que les Caisses Primaires d’Assurance Maladie qui gèrent la sécurité sociale pour pratiquement tout le reste de la population.

Le rapport de la Cour des Comptes pointe que la LMDE est loin de pouvoir répondre à tous les appels (1 sur 14 selon la Cour des comptes, mais la LMDE estime qu’après une situation exceptionnelle, elle est en mesure de répondre à un appel sur deux désormais) et qu’en février 2013, plus de 200 000 courriers restaient en attente de traitement.

En ce qui concerne leur mission de service public, la partie « sécurité sociale », les mutuelles étudiantes sont déficientes : neufs mois après l’inscription, 10 % des étudiants n’avaient toujours pas reçu leur carte vitale (qui permet l’envoi par le médecin ou l’organisme médical de la feuille de soins et de la demande de remboursement électronique instantanément).

Le rapport de la Cour des Comptes indique que « les mutuelles étudiantes paraissent significativement moins productives que les caisses primaires ». Les frais de gestion sont trois fois plus importants dans les mutuelles étudiantes qu’au sein de l’assurance maladie : 13,7 % de frais (93 millions d’euros de frais de gestion en 2011 pour les mutuelles étudiantes pour 681 millions de prestations versées) contre 4,5 % de frais de gestion pour l’assurance maladie.

La suppression de ce régime particulier et de ces mutuelles étudiantes, et le rattachement des étudiants au régime général, permettrait d’économiser 69 millions d’euros tout en améliorant le service rendu aux étudiants estime la Cour des Comptes.

L’histoire de la sécurité sociale étudiante.

Jusqu’en 1948, les enfants étaient couverts par leur parents jusqu’à 16 ans, et par dérogations jusqu’à 20 ans s’ils poursuivaient leurs études. La création de ces organismes de sécurité sociale étudiants a permis dès 1948, d’étendre la sécurité sociale aux étudiants jusqu’à 26 ans. Les régimes de protection sociale se sont d’ailleurs progressivement étendus à toute la population et seule la France compte désormais un statut social étudiant particulier.